Qui est Père Adomon ?

Petite rencontre de bienvenue avec le Père Bé Narcisse ADOMON, nouveau curé de la Paroisse Saint Charles de Foucauld.

Cher Père, bienvenue dans votre nouvelle paroisse !
Avant toute chose, pourriez-vous nous donner une précision sur votre nom ?

En fait, j’ai deux prénoms. Bé est mon prénom africain ; Narcisse est mon prénom chrétien. Comme au pays, vous pourrez m’appeler « Père Adomon » car c’est mon nom de famille.

 

Vous êtes originaire de Côte d’Ivoire ?

Oui, je suis natif de la ville d’Abidjan qui est la capitale économique de la Côte d’Ivoire. Je suis le 10ème d’une famille de 11 enfants (6 garçons, 5 filles). L’un des garçons a rejoint la maison du Père. J’ai été ordonné prêtre le 15 janvier 2005 et depuis, je suis incardiné dans le diocèse d’Abidjan.

 

Quelle est l’histoire de votre vocation et de votre arrivée en Vendée ?

C’est une histoire ancienne… le premier acte, c’est lorsque j’avais 12 ans, j’ai décidé de devenir servant d’Autel.

Le second acte est plus inattendu. J’ai entendu une conversation entre mon frère aîné (au Canada actuellement) qui était au Séminaire et mon papa. Mon frère lui disait qu’il ne voulait plus continuer dans cette voie. Pour moi, il y a eu une évidence à ce moment-là : « s’il sort, alors moi, je rentre. » Je me devais de calmer la déception de mon père, et lui redonner de la joie… Et depuis, je n’ai jamais changé d’avis, et j’en suis très heureux.

Après mon ordination, j’ai été coopérateur pendant cinq ans ; puis j’ai été appelé à revenir au Séminaire propédeutique, mais cette fois comme formateur pendant quatre ans. Ensuite, mon évêque m’a nommé curé d’une paroisse (Saint Joseph de Memni) où je suis resté 6 ans.

Il y a une coopération entre le diocèse d’Abidjan et celui de Luçon. Des prêtres viennent étudier à l’ICES, et en contrepartie, d’autres viennent pour la pastorale. Sachant que j’aime les découvertes, la mission, et faire face à de nouvelles choses, mon évêque m’a alors demandé de venir servir comme prêtre fidei donum en Vendée. Ce n’était pas un désir personnel et j’ai dit : « pourquoi moi ? » et mon évêque m’a dit que j’avais les aptitudes requises. J’ai donc accepté avec joie.

 

J’imagine que c’est un énorme changement par rapport à votre église d’Afrique ?

Oui bien sûr, mais ce n’était pas tout à fait ma première découverte de la France. Une de mes sœurs habite Paris, et j’étais déjà venu la visiter quelques fois. En 2016, j’étais également venu en pastorale d’été à Saint martin de Massy Palaiseau… Mais mon long séjour a débuté le 24 août 2021. J’entame donc ma troisième année… et j’ai déjà beaucoup bougé, à la demande de Mgr Jacolin.

Quand on m’a envoyé en France, je m’attendais bien à ce que la réalité soit très différente de celle de mon pays. J’ai envie de dire que la différence est du même ordre qu’entre un nouveau converti adulte, et un chrétien né dans cette foi depuis tout petit. Notre Église de la Côte d’Ivoire est toute jeune : nous avons fêté il y a trois ans les 125 ans de catholicisme. Ce n’est rien par rapport aux millénaires de votre Histoire ! Là-bas, il y a de nouveaux convertis, tout comme Saint Paul, avec une fougue débordante et qui veut « tout, et tout de suite. » Pour les anciennes chrétientés, il y a une autre approche, plus lente peut-être mais plus ancrée…

 

Vous ne vous sentez pas trop découragé depuis votre arrivée ?

Non, pas découragé du tout, mais j’aimerais être plus imprégné de votre culture d’ici. Il va me falloir du temps pour assimiler vos fonctionnements, vos manières de vous exprimer, les particularités de votre peuple, ses sensibilités et ses attentes.

Je suis ici depuis à peine trois semaines, et je sens déjà une certaine impatience de certains chrétiens. Et c’est d’ailleurs normal : « tu es curé, tu dois prendre telle ou telle décision ! » Mais je ne connais pas encore tous les enjeux, tous les tenants et aboutissants derrière chaque décision à prendre. C’est ce qui rend ma mission ici un peu plus complexe que si j’étais originaire d’ici ; et j’ai besoin que tout le monde comprenne ma situation.

 

Qu’attendez-vous de vos paroissiens pour qu’ils vous aident au mieux ?

Ayez des visages rayonnants ! (rires) C’est vrai ! il ne faut pas être fermés !
Pour être un peu plus sérieux, la première chose que je demande aux chrétiens, c’est de prier. Portez votre curé et vos prêtres dans la prière ; portez la mission de notre paroisse dans votre prière.

Nous ne sommes que deux ici à plein temps, et vous savez que Père Damien doit être prudent avec sa santé. Le défi est immense et nous avons besoin tous ensemble de nous serrer les coudes. Comme on dit « l’union fait la force. » À partir du moment où nous travaillerons ensemble, nous réussirons beaucoup de choses. Dans un bateau, il n’y a qu’un capitaine, mais sans son équipage, sans tous les matelots, il ne peut arriver au port.

Et puis il faut être patient. Vous attendez beaucoup de votre nouveau curé, et c’est bien normal, j’en suis conscient. Et votre « premier pasteur » attend beaucoup de choses des chrétiens que vous êtes. De part et d’autre, nous allons devoir faire des efforts. Il faut donner du temps à l’observation pour que les choses soient bien appréhendées, pour que les choses s’enracinent. S’il n’y a pas ces racines, lorsque le soleil apparaîtra et que c’est la canicule, alors, nous serons asséchés ! Les racines, c’est le temps qui les donnera. Pas de jugements hâtifs les uns sur les autres. Ainsi, dois-je apprendre à vous connaître ; vous aussi, devez apprendre à me connaître.

Sans doute un des premiers signes que j’attends de la part des fidèles, c’est de me faire à priori confiance. Il y a beaucoup de choses auxquelles je dois faire face en peu de temps. Je peux me tromper, chuter, comme tout être humain… J’ai aussi mes lacunes. Certes, le prêtre est mis à part pour servir de lien entre Dieu et son Peuple, mais seul Dieu est Saint. Le prêtre, comme tous les autres baptisés tend vers la sainteté. Tout ce que nous faisons sur la terre doit concourir à cela. Nous sommes aussi là pour nous aider mutuellement sur ce chemin.

Souvent, lorsque nous faisons quelque chose, nous recherchons le résultat. Et si le résultat tarde à venir, nous avons tendance à nous laisser gagner par le découragement, ou les jugements inutiles. Ceci ferme nos yeux sur ce qui pourrait venir de bien et de beau. Et si au contraire, on laissait le temps de faire germer et fleurir ce que nous aurons semé ensemble ?

Un autre piège serait de tomber dans la comparaison. Par rapport à mes prédécesseurs par exemple. Je ne suis pas l’autre ! Je demande donc aux chrétiens de se montrer ouverts. J’essaie de faire un effort d’ouverture de mon côté aussi, et ensemble nous pourrons mener à bien la pastorale si nous cultivons cet esprit d’ouverture et de communion dans la proximité. Vous savez bien que la Mission n’est pas que l’affaire du curé, mais de nous tous ensemble. C’est d’ailleurs ce que Mgr Jacolin a voulu dire par : « Tous, envoyés en mission » ; et chacun a sa place dans cet envoi.

Je suis conscient qu’être missionnaire au milieu de vous tout en étant africain, c’est un défi, et ce défi me plaît ! C’est bien ensemble que nous pourrons le relever.

 

Certains chrétiens n’ont pas compris pourquoi, à peine arrivé, vous semblez déjà repartir…

Non ! Pas du tout ! Je ne repars pas, mais je prends un temps de repos nécessaire au bien-être physique, moral et psychique.

Et puis, mon retour au pays pour le mois d’octobre avait été programmé bien longtemps avant que Mgr Jacolin me demande de venir à Challans. Mon billet d’avion était déjà acheté… Cela peut paraître bizarre en effet qu’à peine arrivé, je m’absente un mois de ma nouvelle paroisse ; mais sachez aussi que l’ordination du Père Jean comme évêque n’était pas prévue, et de mon côté, je ne pouvais pas annuler. Monseigneur a estimé que ce voyage n’était pas incompatible avec ma nomination… Mais n’ayez crainte : je vous reviens très bientôt et en pleine forme !

 

Après votre retour pourrions-nous organiser une rencontre où vous pourriez nous parler un peu plus de vous et de votre pays ?

C’est une très bonne idée, et je le ferai avec joie ! Je laisse mes paroissiens organiser cette soirée…

 

Merci Père Adomon d’avoir pris le temps de cet échange qui nous aide à mieux vous découvrir ! Et au nom des paroissiens, je vous souhaite une belle mission au milieu de nous et avec nous…

C’est moi qui vous remercie. Et à très bientôt pour la pastorale.

 

(propos recueillis par Gaëtan Guibouin)

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